Jack (Horimouja) Mosher – Mon backpiece fait en 2 mois

Jack (Horimouja) Mosher – Mon backpiece fait en 2 mois

La première fois que j’ai visité une convention de tatouage était en 2007 à Montréal. J’y ai passé des heures et j’ai dépensé tout l’argent que j’avais pour acheter deux livres par Horimouja:

  1. 100 Japanese Tattoo Designs part II
  2. Bloody Japanese Prints

Ils m’avaient couté 300$ ce qui était énorme avec mon petit salaire d’emballeur à temps partiel chez IGA. J’ai passé des jours à l’étudier et à le regarder et c’est à ce moment que j’ai décidé qu’un jour j’allais me faire tatouer par Jack Mosher.

J’ai donc fini par prendre un rendez-vous dans son studio à l’époque : Body Armor Tattoo à Kalamazoo au Michigan. C’était un voyage de 12 heures que j’ai fait avec ma copine, Virginie et mon ami d’enfance Patrick. Un road trip pour aller me faire tatouer par mon idole! J’étais excité et nerveux.

Je voulais un tigre sur les côtes avec un lapin. Arrivé à mon rendez-vous, j’étais surpris qu’il n’eût pas préparé de dessin. Il m’a expliqué qu’il faisait tout free-hand. Il a donc pris un sharpie et s’est mis à dessiner sur mes côtes. J’étais émerveillé de voir quelqu’un travaillé sans stencil. Je connaissais son talent en dessin alors je n’étais pas stressé et je lui faisais entièrement confiance. Je me suis fait tatouer deux jours de suite et le résultat était époustouflant.

J’ai beaucoup apprécié ce temps au Michigan à regarder ce que Jack faisait et à discuter avec lui. J’ai compris que je pourrais en apprendre beaucoup sur le tatouage japonais avec lui. J’ai donc décidé de lui faire faire mon backpiece.

Je suis resté en contact avec Jack pour apprendre que par chance, il déménageait à Érié en Pennsylvanie et donc il se rapprochait de moi (à 8h de route au lieu de 12h)! On a donc cédulé de se rencontrer pour commencer mon dos. Arrivé à mon rendez-vous à Érié, j’hésitais entre me faire un backpiece de Taira no Tomomori, le valeureux samurai, ou Shuten Doji, le roi des démons. J’ai laissé Jack décidé et il a choisi Shuten Doji car c’est un sujet beaucoup moins commun!

Grâce à Shuko, sa femme d’originie japonaise, il a incorporé pleins d’éléments en lien avec l’histoire de Shuten Doji à mon backpiece. Il y a donc beaucoup de symboles cachés : 

  • Dans la hache, on peut lire le caractère 亡者 qui se prononce ‘’Mouja’’, comme le nom à Jack Hori-mouja, qui signifie mort-vivant. Il a donc laissé sa signature dans mon tatouage.
  • Il porte des peaux de tigre à ses épaules car Shuten Doji devait sortir à l’heure du tigre (entre 3h00 et 5h00 du matin) car selon le système traditionnel d’heures japonaises, le tigre sortait à cette heure pour tuer ses proies.
  • Certain de ses bijoux sont des fleurs de lys en référence à mes origines québecoises.

Mon backpiece a vraiment été fait en 2 mois et demie, malgré le 8 heures de route qui me séparaient de Jack. Ce qui prouve que quand on est motivé, on peut faire n’importe quoi! Jack partait vivre en Californie car il avait eu un poste pour travailler à High Voltage (le studio de Kat Von D), ainsi on était limité dans le temps.

Chaque semaine, je partais vers 18h00 le dimanche soir après mon shift au studio de tatouage, pour conduire jusqu’à Érié en Pennsylvanie, pour me faire tatouer pendant 2-3 jours consécutifs. Je me faisais tatouer lundi, mardi et mercredi. Et je repartais le mercredi soir pour être de retour jeudi matin au travail et commencer mon shift de tatouage. Pour ceux qui se demandent pourquoi je n’y allais pas en avion, sachez que je n’avais tout simplement pas les moyens de me payer l’avion. Je préférais mettre mon argent dans mon tatouage et dans mon apprentissage que dans le confort d’un avion. Au final, j’estime que Jack a mis une soixantaine d’heures de tatouage dans mon dos dans ce 2 mois!

En plus de me faire tatouer, j’ai passé beaucoup de temps à dessiner et parler avec Jack. Il a la plus grande collection de livre d’art japonais que j’ai jamais vue. J’ai passé des heures à consulter ses livres et il m’en a même donné un. On dessinait jusqu’à tard le soir, il m’expliquait des concepts et il m’a appris beaucoup de techniques. Tout ce temps vaut de l’or et j’en suis très reconnaissant d’avoir eu cette chance.


Tebori tattoo 手彫り – Tatouage gravé à la main

Tebori tattoo 手彫り – Tatouage gravé à la main

Il est impossible de comprendre le tatouage japonais sans comprendre les termes japonais qui entourent cette pratique.

On entend souvent dire que les tatouages sont mal vus au Japon. Ceci est causé en parti par l’utilisation des tatouages comme forme de punition lors de la période Edo (1600–1868). Lorsqu’un crime, ne méritant pas la mort (ex. : un vol) était commis, le criminel se faisait tatouer son crime à un endroit visible pour avertir les gens. Ce type de punition par tatouage s’appelait Bokukei. Par la suite, des groupes de criminels (ex : les Yakuza) ont cherché à cacher ces bokukei par des tatouages plus élaborés.

Des artistes, qu’on appelle Horishi, ont commencé à faire des tatouages complexes et colorés qui devenaient de vraies œuvres d’art. Se basant sur les estampes japonaises, ils se servaient de tout le corps du client comme un canevas. C’est de là qu’a commencé l’épellation Horimono (qui signifie aussi tatouage).

Aujourd’hui, on entend plus le mot Irezumi, terme général pour tatouage. Contrairement à Horimono, Irezumi fait plus référence au petit tatouage simple.

Voici le lien pour le film : https://www.youtube.com/watch?v=q1h8K92cEag

Il y a plusieurs raisons qui expliquent ces différents mots pour dire TATOUAGE. Une raison majeure est qu’au début de la période Meiji (1868-1912), le gouvernement a statué que les tatouages étaient illégaux, résultant en la criminalisation de l’art. Ainsi les termes comme bokukei, horimono et irezumi ont une connotation négative qui se fait encore sentir aujourd’hui.

En plus de tous ces différents mots pour dire TATOUAGE, il y a aussi deux styles de tatouage au Japon : Le Yobori qui signifie le tatouage Occidental fait à la machine et il y a le Wabori qui signifie le tatouage traditionnel japonais fait à la main (au Tebori).

Le yobori est le tatouage traditionnel comme on le connaît. Fait à la machine avec de l’électricité. Ce type de tatouage a été importé par l’Occident. Dans le yobori on retrouve les styles de tatouages comme le Old School, Neotrad, etc. tout ce qui est importé de l’occident.

Le wabori a été inventé au Japon car c’est ce qu’on appelle communément le style Japonais. Basé sur les estampes japonaises et les images du bouddhisme, le wabori rassemble tous les éléments du style japonais. Le wabori est traditionnellement fait au Tebori (à la main).

Avant même l’invention de l’électricité, le tebori a été inventé au Japon par les Horishi pendant la période Edo pour camoufler les bokukei (punition d’un crime) et faire des horimono (œuvre d’art). Le tebori se fait en mettant des aiguilles au bout d’un bâton en bambou et avec un élan de la main, l’encre est perforée dans la peau. Aucune électricité, aucune machine.

Les deux types de tatouages sont pratiqués au Japon. Certains tatoueurs ne pratiquent qu’un seul style tandis que certains maîtrisent les deux. Tout dépend du Maître et de la famille.

Étant plus rare, le tebori est entouré de mythes. Certains croient que le fait de faire un tatouage au tebori infuse le tatouage d’une protection vitale (tel un talisman) car l’artiste y met son empreinte physique. Au japon il y a une valeur spirituelle plus grande pour les tatouages au tebori que les tatouages fait à la machine.

Deux caractéristiques du tebori refont souvent surface :

  1. Le tebori fait moins mal que le tatouage à la machine car moins d’aiguilles perforent la peau par seconde.
  2. Les couleurs restent vives plus longtemps car plus de pigment (d’encre est déposée sous la peau).

Par contre, pas tous les types de tatouage se font au tebori. Souvent le style de tatouage associé au tebori est le style Japonais Traditionnel. Des couleurs pleines et vives, sans dégradées avec des grosses lignes. Il ne serait pas possible de faire un portrait au tebori, cet outil n’est pas fait pour cela.

Oui je fais du tebori !

Je fais du tatouage au tebori, mais je choisis des pièces dont le rendu se fait mieux au tebori qu’à la machine. Donc je ne fais pas n’importe quoi au tebori.

De plus, il est normal de comprendre qu’un tatouage au tebori prend plus de temps à faire qu’à la machine, ainsi le prix va en conséquence. Pour plus d’information ou pour faire une demande, vous pouvez m’écrire ou remplir le formulaire sur mon site : www.jftattoo.com


Tengu – 天狗

Tengu – 天狗

Les Tengus sont des êtres malins vivant dans les montagnes. On retrace leur origine à la Chine antique où ils étaient appelés « Chiens Divins ». Ils protègent la montagne et ils sont considérés comme des kami (divinité shintoïste). Ils détestent les gens vaniteux et narcissiques. Dans la montagne, vous serez jugés : Si vous êtes gentil et bon, les Tengus vous récompensent, mais si vous n’êtes pas respectueux, vous pouvez le payer très cher.

Ils sont tous maîtres d’art martiaux : ils s’entraînent, tels des moines Shaolin, dans la montagne. Au combat, ils sont autant sinon plus doués que les hommes. Quelques guerriers légendaires ont eu la chance de s’entraîner avec ceux-ci. Selon certaines histoires, certains Tengus ont réussi à atteindre le pouvoir de téléportation et de télépathie après des années d’entraînement.

Les Tengus adorent jouer des tours et tendre des pièges aux gens perdus dans la forêt. Ils sont capables de voler et de se transformer. Ils sont très coquins; leurs manteaux de paille les rendent invisibles. Ils se rendent visible qu’à ceux qu’ils jugent dignes de leur présence. Lors de mon troisième voyage au Japon, j’ai eu la chance de gravir Takao-San qui est la montagne des Tengu. Je n’ai pas eu la chance d’en voir un par contre. 😉

Il y a principalement deux sortes de Tengus : les Karasu Tengus et les Yamabushi Tengus.

  • Les Karasu Tengu sont les Tengus à face de corbeau. Ils sont reconnus pour être plutôt agressifs et très habiles avec une épée. Descendant du dieu des tempêtes (Susanoo), ils peuvent détruire tout sur leur passage.

  • Les Yamabushi Tengu sont les Tengu à long nez et à la peau rouge. Ils sont plus dociles et ils ressemblent plus à des hommes. Ils sont beaucoup plus forts et intelligents que leurs confrères et adorent le démontrer. Ils vont souvent utiliser la ruse pour se sortir d’un conflit. Justement, « Tengu ni naru » qui signifie devenir un Tengu, est une expression japonaise utilisé pour décrire une personne trop fière, voir vaniteuse.

Le chef du clan est le Dai Tengu. Il ressemble à un Yamabushi Tengu mais a l’apparence encore plus humaine. Il est le sage de la montagne : le plus puissant et le plus intelligent des Tengus.

Une histoire de Tengu

Kobu-tori Jiisan (瘤取り爺さん)

Un vieil et honnête homme a une vilaine bosse sur le visage. Un jour, en se promenant dans la montagne, il rencontre un groupe de Tengus qui font la fête. Il choisit de se joindre à eux et de danser. Les Tengus sont tellement impressionnés qu’ils veulent le revoir la nuit suivante. Pour s’assurer de sa présence, ils lui donnent un morceau de leur trésor et ils lui retirent la bosse du visage, pensant qu’il voudrait la reprendre la nuit suivante. Son vilain voisin, qui a aussi une bosse, entend parler de la bonne fortune du vieil homme et essaie de faire la même chose la nuit suivante. Mais il danse très mal et essaie de voler le trésor des Tengus. Dégoûtés, les Tengus lui donnèrent simplement la bosse de son voisin en lui laissant la sienne.


Dragon japonais – 龍 (Ryū) ou 竜 (Tatsu)

Dragon japonais – 龍 (Ryū) ou 竜 (Tatsu)

Le dragon est possiblement l’animal mythologique le plus connu. Son apparence varie selon les époques et les régions. Par exemple, tout le monde est familier avec le dragon médiéval qui ressemble plus à un lézard, tandis que le dragon chinois ressemble plus à un serpent.

Au Japon, le dragon est un animal mythologique. Cela signifie qu’il n’est pas un monstre, qu’il n’est pas un être transformé en dragon à cause d’une malédiction. Il s’agit plutôt d’un animal rare. Un dragon à une tête est de nature bonace tandis qu’un dragon à plusieurs têtes est souvent méchant.

Apparence

Dans les vieux textes japonais, le dragon est traduit par « serpent ou naga », car ils sont tous deux des êtres serpentins aquatiques et ils sont techniquement considérés comme étant le même animal. Traditionnellement, il est dit que le dragon aurait le corps d’un serpent sans aile, la tête d’un chameau, les corne d’un chevreuil, les yeux d’un lièvre, les oreilles d’un buffle, le nez d’un gobelin, les écailles d’un koi (carpe japonaise), les pattes d’un tigre, les griffes d’un aigle et des moustaches.

Encore là, le dragon reste un animal mythologique, ainsi son apparence dépend de l’interprétation de l’artiste. Une particularité reste importante : le dragon chinois a 4 ou 5 doigts tandis que le dragon japonais en a juste 3.

Le dragon peut être pairé avec le tigre pour représenter la balance du pouvoir. Ensemble, ils représentent l’équilibre sacré entre deux êtres puissants; le dragon règne sur le ciel et les eaux tandis que le tigre domine la terre. Le dragon peut aussi être pairé avec un phénix pour représenter une union dans la rivalité ou dans l’amour. Tel le Yin et le Yang, l’empereur portait l’emblème du dragon (masculin) tandis que l’impératrice portait celui du phénix (féminin).

Symbolisme

Le symbole du dragon (et du serpent) est, premièrement, celui de sagesse et de protection. Fortement associé à l’eau, les pompiers de l’époque Edo sont les premiers à se faire tatouer un dragon comme un talisman de protection contre les feux. Les dragons sont aussi connus pour leur force, leur intelligence et leur compassion.

Ils sont souvent tatoués avec un background de nuage, qui symbolise l’immortalité et la jeunesse éternelle. Les dragons peuvent aussi tenir un joyau rond dans leur patte. Cette perle, qui permet au dragon de voyager entre les royaumes du monde, contiendrait l’essence spirituel de l’univers et symboliserait la sagesse et la chance.

Tel que mentionné plus haut, le dragon est un amalgame d’animaux. Ainsi, le dragon peut aussi représenter le chemin de la vie : L’histoire classique chinoise du dragon raconte qu’il n’était qu’une carpe (poisson) au départ. Un jour, la carpe décida de remonter la rivière. En chemin, elle rencontra plusieurs animaux avec des caractéristiques différentes. Lors de ces rencontres, elle prit une caractéristique physique de chacun de ces animaux. Par exemple : après avoir rencontré l’aigle, elle prit les griffes de celui-ci. Après avoir rencontré le serpent, elle prit le corps de ce dernier. Finalement, elle arrive en haut de la rivière avec toutes ces nouvelles caractéristiques et devient le dragon! Cette histoire est très symbolique car les animaux peuvent représenter des gens de votre entourage ou des étapes de vie : Chaque moment et chaque rencontre vous changent pour que vous puissiez devenir un dragon.

On retrouve aussi des tatouages de dragon en transition. Un être mi-poisson et mi-dragon, comme le shachihoko, est souvent utilisé dans le tatouage pour représenter un parcours entamé mais non complété. Les statues de shachihoko sont placées sur les toits des temples et châteaux, en guise de protection contre les feux.

Histoires connues de dragon

Ryujin est le dieu de la mer. Il est un majestueux dragon qui est capable de contrôler la marée avec des joyaux magiques et il possède un somptueux palais dans le fond de la mer. Plusieurs contes sont associés à ce fameux dragon.

Yamata-no-orochi est un vilain dragon à 8 têtes qui terrorisait un village. À chaque année, il venait et dévorait une jeune fille. Le dieu des tempêtes, Susanoo, réussi à le tuer et trouva dans son cadavre le fameux Kusanagi-noTsurugi, l’Excalibur japonais.


Légalisation du tatouage au Japon

Légalisation du tatouage au Japon

Avec l’année de fou que nous vivons en 2020, je suis heureux de vous annoncer au moins une bonne nouvelle: le 17 septembre dernier, la Cour Suprême du Japon (le plus haut tribunal au pays) a émis un verdict qui dit que, maintenant, LE TATOUAGE EST LÉGAL AU JAPON!

Je ne veux pas rentrer dans les détails techniques du verdict, mais en résumé, cela veut dire que la pratique du tatouage est maintenant légale sans licence médicale! Tel que mentionné dans mon blogue précédent qui parle de « L’interdiction du tatouage au Japon », depuis plusieurs années le tatouage était tombé dans une zone grise de la loi : Le tatouage n’était pas interdit, mais il fallait une licence médicale (donc être médecin) pour le pratiquer.

Les artistes (qui bien sûr n’ont pas de diplôme de médecine) pratiquaient donc l’art du tatouage clandestinement selon la loi. Même qu’en 2015, la cour d’Osaka a condamné Taiki Masuda, un tatoueur de 30 ans, à une amende de 300,000 yens (environ 3600$ CAN) pour avoir violé « l’acte de pratique médical », qui réserve qu’au médecin le droit de pratiquer des « actes médicaux ».

Après plusieurs années de combat, c’est en 2018 Taiki Masuda gagne son procès. Il aura fallu attendre 2 ans plus tard, soit jusqu’en Septembre 2020 pour que la Cour Suprême se penche sur le dossier.

C’est une très grande nouvelle dans le monde du tatouage! Pour les artistes au Japon, c’est vu comme un soulagement intense! Pour eux, cela signifie qu’ils peuvent enfin sortir de l’ombre. Par exemple, ils pourront louer des locaux commerciaux pour tatouer, afficher leur magasin, importer du matériel et des outils sans risquer de se faire arrêter.

Le Tattoo Ban avait été très difficile sur les tatoueurs japonais, forçant plusieurs studios de tatouage à fermer et forçant plusieurs tatoueurs à déménager dans d’autres pays pour pratiquer leur art. Peut-être qu’avec cette nouvelle, plusieurs d’entre eux retourneront vivre au Japon?

Malgré la grande nouvelle, les impacts réels seront petits pour le moment. La mentalité des Japonais face au tatouage reste très conservatrice et ça prendra plusieurs années pour que l’acceptation du tatouage se fasse au sein de la population.

Ainsi, les banques, les écoles et les entreprises resteront frileux avec les tatoueurs et les tatoués japonais. Ils savent qu’ils vivront encore stigmatisés dans leur vie de tous les jours, mais ils sont contents de voir leur gouvernement prendre un pas dans la bonne direction.

Les choses ne changeront pas du jour au lendemain, mais je suis très heureux pour mes confrères japonais! Maintenant, ils peuvent pratiquer le plus bel art au monde sans risquer de devenir un criminel.


Le troisième voyage au Japon - Février 2017

Le troisième voyage au Japon - Février 2017

Après deux premiers voyages au Japon, je commence à m’y connaître et à me faire des contacts. J’ai donc commencé par visiter une connaissance, Eru-san, qui est propriétaire du studio de tatouage WTS Tattoo à Kanagawa et qui est aussi un constructeur de machine de tatouage. Eru- san a pris le temps de me montrer son atelier et j’ai eu la chance de visiter son studio. Peut-être que la prochaine fois, j’y retournerai pour faire un guest spot.

Par la suite s’en ait suivi de deux séances de tatouage avec Shige. On a fait l’intérieur du bras : ITAI! (痛い) signifiant OUCH en japonais! Encore une fois, j’ai pu apprécier être dans le studio Yellow Blaze et discuter avec Shige.

S’en est suivit de visite des temples, de musées et autre, le temps de faire guérir un peu mon bras. Je suis allé voir le musée Ghibli de Mitaka, car oui je suis un fan du travail du grand Hayao Miyasaki. Je suis allé au spectacle du Robot Restaurent de Tokyo qui était très amusant, mais c’est plutôt une affaire de touristes car aucun Japonais ne connaissait cet endroit. Ainsi que le musée de Hokusai de Sumida. Le musée de Hokusai m’a permis de revenir à l’essence du tatouage japonais car il ne faut pas oublier que les estampes japonaises sont la base de cet art. Et le plus grand maître incontesté de Ukiyo-e est Hokuai.

Pour ce qui est des temples, j’ai gravi Takao-san qui est la montagne des tengus. Cet endroit est superbe pour les références de tengus et lorsqu’arrivé en haut, il y a une superbe vue du mont Fuji. Je suis aussi allé à Nikko qui est reconnu pour ses dragons. En effet, c’est à Nikko que l’on retrouve plusieurs plafonds avec des peinture de dragon. Si vous visitez Nikko, prenez le temps d’aller voir les différents peintres de dragon dans les petits magasins en montant. C’est là que l’on retrouve ces fameux artistes qui font des dragons en un coup de pinceau. Et aussi prenez le temps de manger du yuba (qui est une sorte de tofu) c’est une de leur spécialité et c’est délicieux!

Pour ceux qui me connaissent bien, si je ne suis pas en train de visiter ou de me faire tatouer, vous aller me retrouver dans les librairies. Je suis un grand collectionneur de livre sur l’art japonais alors je peux passer des heures dans les librairies au Japon! J’ai même acheter une valise de plus pour rapporter les livres que j’ai achetés.

La deuxième section du voyage se faisait à Gifu, dans la région de Chubu. J’avais un rendez-vous avez Tomoya un ami tatoueur que j’ai rencontré il y a plusieurs années. Je voulais me faire faire mon premier tatouage au tebori. Je lui ai laissé carte blanche et compte tenu du temps de l’année et de mes buts, il a décidé de faire un cerf-volant avec une poupée Daruma. Le cerf-volant est un jeu que les enfants pratique au printemps et la poupée Daruma est un symbole utilisé pour représenter un but à accomplir.

La veille du tatouage, nous sommes allés prier au temple Dairyu-ji qui est le temps du Dragon et du Daruma. Selon Tomoya, la prière permettrait de bénir le tatouage, le rendant chanceux et lui permettant de m’aider à accomplir mes buts. Cette expérience de prier et de me recueillir avant de se faire tatouer a apporté une dimension très personnelle à ce tatouage. Je pense avoir compris encore plus l’essence

S’en ai suivi de mon tatouage au tebori : 7h de temps dans les côtes. Je dois dire qu’au début je trouvais que le tebori était moins douloureux que le tatouage à la machine. Par contre après 7h de temps, j’en étais plus certain.

La dernière section du voyage s’est faite à Yokohama car j’avais encore deux séances de tatouage avec Shige. Ces dernières deux séances ont permis de terminer mon tatouage commencé en 2013. Pendant toutes ces années, je suis heureux de dire que j’ai beaucoup appris grâce à lui et que je suis très reconnaissant de cette chance que j’ai eu.

Lors de ce voyage, j’ai enduré plus d’une trentaine d’heures de tatouage en 3 semaines. Mais tout ceci en a valu la peine car j’ai forgé de nouvelles amitiés, appris de nouvelles techniques et je suis retourné aux racines du tatouage japonais. J’ai même eu la chance de laisser un collant de mon studio Zen Tattoo sur la porte du Yellow Blaze Tattoo. Ainsi une petite section du Canada se retrouve au Japon.


Hannya – 般若

Hannya – 般若

Le hannya est l’un des designs les plus reconnaissable du tatouage japonais, mais peu de gens connaissent sa signification.

Le masque hannya a été créé au 14 e siècle pour le théâtre. Le théatre Noh est l’un des plus vieux arts théâtraux toujours performé aujourd’hui. Historiquement, seuls les hommes avaient le droit de jouer dans les pièces de théâtre. Ainsi, plusieurs masques ont été fabriqués pour représenter différents personnages (masculins, féminins, animaliers, etc.) Les femmes ont commencé à pouvoir faire du théâtre professionnel seulement qu’en 1948.

Dans le théâtre Noh, le hannya représente une femme tellement jalouse qu’elle se transforme en démon. Le masque hannya est façonné pour qu’il soit à la fois démoniaque et tourmenté. En effet, lorsque l’acteur penche la tête vers l’avant, les traits du masque donne l’impression que le hannya est triste, tandis que lorsque l’acteur garde la tête droite, le hannya a l’air enragé. Avec un seul masque, l’acteur peut donc représenter plusieurs émotions.

Il a deux cornes, une large bouche, des crocs et un air inhumain. La couleur des masques a aussi une signification précise : le masque blanc est utilisé pour représenter une femme de la noblesse tandis que le rouge représente une femme d’une classe plus basse. Le rouge est aussi la couleur classique des démons dans la mythologie japonaise.

Le masque de hannya a été créé pour représenter une complexe émotion bien précise : la jalousie d’une femme. Au Japon, avoir des cornes est synonyme de rage! C’est donc très ancré dans la culture japonaise qu’une femme a des cornes lorsqu’elle est jalouse et enragée. Tellement que, lors d’un mariage traditionnel Shintoïste, la femme porte un voile spécifique appelé tsunokakushi qui se traduit comme : « cache-corne ».

Symboliquement, il a deux significations dépendamment des maîtres :

  • Il exprime comment quelque chose d’aussi beau que la beauté d’une femme peut devenir quelque chose d’aussi terrifiant.
  • Le fait de se tatouer un démon a un effet protecteur. Par conséquent, le tatouage d’un hannya agit comme un talisman et fait peur aux mauvais esprits, un peu comme la gargouille pour les églises gothiques.

L’histoire la plus connus du hannya est celle de Kiyohime :

La belle Kiyohime tomba amoureuse d’Anchin, un moine itinérant qui venait visiter son village depuis sa tendre enfance. Anchin s’est amusé à promettre à la fille qu’il l’épouserait dès qu’elle aurait atteint l’âge. Mais en réalité le moine n’était qu’un coureur de jupon qui profitait de la naïveté des femmes. À son anniversaire, le moine lui dit que ce n’était qu’une blague et qu’il ne l’épouserait pas. Kiyohime devint folle de rage et elle se lança à sa poursuite. Elle finit par le rattraper au bord de la rivière Hidaka, mais Anchin s’empara d’un bateau et s’enfuit. Kiyohime tenta de traverser la rivière à la nage. Sa colère était si intense que, pendant la traversée, elle se transforma en un énorme serpent avec le visage d’un hannya. Lorsque Anchin vit cela, il se réfugia dans un temple. Il chercha secours auprès des prêtres qui tentaient de le dissimuler sous la cloche en bronze du temple. Toutefois, le serpent Kiyohime le senti et s’enroula autour de la cloche. Elle se mit à cracher du feu jusqu’à ce que la cloche de bronze fonde. Kiyohime tua ainsi le moine qu’elle avait tant aimé et disparaît elle aussi dans les flammes.


Carpe japonaise – Koi 鯉

Carpe japonaise – Koi 鯉

La carpe (dit koi en japonais) est un des animaux les plus iconiques du tatouage japonais, car il a plusieurs significations. Les significations varient énormément selon les maîtres et les familles de tatouages japonais. Tous semblent avoir leur opinion sur la carpe, je résume donc certaines symboliques dans ce blog:

La carpe qui devient un dragon : force, détermination, courage et persévérance.

Vous avez possiblement déjà vue une carpe, c’est un poisson très las : il reste dans le fond et remonte seulement pour manger. Ce n’est pas un poisson reconnu pour sa nature très combative. L’histoire qui veut que la carpe ait décidé de nager à contre-courant pour remonter la rivière et devenir un dragon n’est donc qu’une légende, car ce comportement serait contre sa nature. Cette légende est donc utilisée pour représenter la force, la détermination, le courage et la persévérance. Ce seul poisson décide d’aller contre sa nature : il se bat contre lui-même et contre le courant de la rivière dans le but de devenir quelque chose de plus grand (un dragon). Puisqu’il s’agit toujours d’un seul poisson, il est aussi symbole d’indépendance.

On retrouve aussi des tatouages japonais d’un être mi-poisson et mi-dragon appelé shachihoko. Il est une carpe en transition de devenir un dragon, souvent utilisé dans le tatouage pour représenter un parcours entamé mais non complété.

Dans un tatouage japonais, le sens du poisson a aussi une symbolique. Si le poisson est vu montant la rivière, cela signifie qu’il aspire à quelque chose, car il est en train de se battre pour atteindre son but. À l’inverse, si le poisson est vu descendant la rivière, cela signifie qu’il est confortable avec ce qu’il a; il se laisse porter par le courant car il a atteint son but.

Les koinobori : La famille

La carpe est aussi un symbole de bravoure et de virilité : les koinobori signifiant « banderole de carpe » sont des manches à air en forme de carpe hissées lors de la fête des garçons, soit le 5 mai de chaque année au Japon. Les parents les hissent pour exprimer leur souhait que leurs fils grandissent forts et en santé. Ainsi, les koinoboris sont utilisés pour représenter les membres d’une famille : le noir, appelé magoe, représente le père, le rouge appelé higoe, représente la mère et le bleu appelé kogoe représente l’enfant. D’autres couleurs peuvent être utilisées pour représenter d’autres membres de la famille.

Dans le tatouage japonais traditionnel, il y a trois types de carpes : higoi, la carpe rouge, magoi, la carpe noire et nishikigoi qui se traduit comme la carpe multicolore.

Mariage heureux et amour éternel

Deux carpes ensemble peuvent aussi symboliser un mariage heureux et une vie éternelle ensemble. Cette interprétation vient de la combinaison de deux faits : le premier est que les carpes sont des poissons qui peuvent vivre jusqu’a 100 ans. Le deuxième fait est que le kanji 恋, qui signifie amour, est aussi prononcé koi en japonais.

La prospérité

La carpe peut aussi représenter la prospérité, car c’est un poisson très dispendieux. En effet, ces poissons sont élevés avec soins et les éleveurs s’efforcent à avoir les poissons les plus colorés, car ils savent qu’ils peuvent les vendre une fortune. En 2018, une carpe s’est vendue $ 1.7 millions US, ce qui en a fait le poisson le plus cher au monde.

La carpe et les fleurs

Lorsque la carpe est combinée avec le lotus, cela accentue la symbolique de difficulté dans l’adversité. En effet, le lotus est une fleur magnifique qui grandie dans les étangs les plus marécageux et boueux. Cela montre donc que le lotus est résilient au point de devenir une fleur magnifique dans un environnement difficile.

Outre la fleur de lotus, la carpe peut être pairée avec plusieurs fleurs. Dans le tatouage traditionnel, on la voit souvent avec des fleurs de cerisiers (sakura) et des feuilles d’érable japonais (momiji). C’est justement sur ce sujet que débattent plusieurs maîtres du tatouage japonais. Certains les pairent avec les sakuras pour représenter la beauté des poissons, tandis que d’autres les pairent avec les feuilles d’érables pour représenter le moment de l’année où ces poissons sont le plus actifs et vont plus remonter la rivière (à l’automne).

Les contes connus de carpe

Le conte le plus connu faisant référence à une carpe est certainement celui de Kintarō qui se bat contre une gigantesque carpe. Kintarō pourrait être comparé à un bébé hercule : né avec une force surhumaine, il se bat contre les ogres et les monstres dès sa tendre enfance. Son combat le plus populaire est justement contre hitokui koi (une gigantesque carpe noir mangeuse d’homme). Il s’est battu à main nue tel un valeureux lutteur Sumo.

L’histoire de Kintarō est souvent confondue avec celle d’Oniwakamaru, qui lui aussi s’est battue contre un hitokui koi. La façon de les distinguer est souvent par l’habillement des deux personnages ainsi que par la présence d’un katana (épée), car Oniwakamaru a poignardé le poisson.

La carpe est aussi le moyen de transport de la déesse Kannon, déesse de la compassion. Elle est l’une des plus grandes divinités du Japon. On retrouve plusieurs temples et statues dédiés à Kannon au Japon.


Serpent – Hebi 蛇

Le serpent – hebi 蛇

Dans la mythologie occidentale, le serpent a plutôt une connotation négative. On n’a qu’à penser à la Bible où le serpent trompa Ève à manger la pomme. Par contre c’est le contraire en orient : le serpent est souvent considéré comme un messager des Dieux et est un symbole de protection et de chance.

Tel que mentionné dans le texte sur les dragons, ce n’est que très récent que les Japonais font une distinction entre un serpent et un dragon. Dans l’ancien temps, il s’agissait du même animal, ainsi plusieurs textes font référence à des dragons et ont été traduit à titre de serpents, et vice-versa.

Le fait de voir un serpent était un moment spécial et rare car c’était comme voir un dragon. Le plus rare des serpents est le serpent blanc (shirohebi). Plusieurs temples Shintoïstes sont dédiés à ce messager des Dieux.

Traditionnellement, le serpent est souvent représenté avec des motifs rappelant le printemps, l’été ou l’automne. Puisque c’est un animal qui hiberne, on le verra pairé avec des éléments d’hiver. Ainsi dans le tatouage Japonais, on le paire souvent avec des fleurs tels que les sakuras et les pivoines, pour rappeler le moment qu’il émerge de son terrier. On peut le voir aussi pairé avec les feuilles d’érable (momiji).

Symbolisme

Le serpent est un animal spirituel très puissant et il a les mêmes caractéristiques de sagesse et de protection que le dragon. Il est protecteur de maladie, de désastre et de mauvaise fortune.

À cause de sa capacité de muer, le serpent était associé à la vie éternelle. Aujourd’hui il représente plutôt le changement et la régénération.

Le serpent est considéré comme un animal très chanceux. Les fermiers vénéraient le serpent comme un porte-bonheur quand il se trouvait à en avoir un qui vivait sous la maison.

Histoires connues de serpent

Un des ninjas les plus connu de l’histoire est Orochimaru : Dans le conte traditionnel Jiraiya Gōketsu Monogatari, Orochimaru se fait ensorceler par un serpent. Il reçoit ainsi des pouvoirs magiques lui permettant de se transformer en serpent géant pour tuer son ennemi, Jiraiya.

Une autre histoire connue est celle de Kiyohime.

La belle Kiyohime tombe amoureuse d’Anchin, un moine itinérant qui vient visiter son village depuis sa tendre enfance. Anchin s’est amusé à promettre à la fille qu’il l’épouserait dès qu’elle aurait atteint l’âge. Mais en réalité le moine n’est qu’un coureur de jupon qui profite de la naïveté des femmes. À son anniversaire, le moine lui dit que ce n’était qu’une blague et qu’il ne l’épousera pas. Kiyohime devient folle de rage et elle se lance à sa poursuite. Elle finit par le rattraper au bord de la rivière Hidaka, mais Anchin s’empare d’un bateau et s’enfuit. Kiyohime tente de traverser la rivière à la nage. Sa colère est si intense que, pendant la traversée, elle se transforme en un énorme serpent avec un visage de hannya (démon). Lorsque Anchin voit cela, il se réfugie dans un temple. Il cherche secours auprès des prêtres qui tentent de le dissimuler sous la cloche en bronze du temple. Toutefois, le serpent Kiyohime le sent et elle s’enroule autour de la cloche. Elle se met à cracher du feu jusqu’à ce que la cloche de bronze fonde. Kiyohime tue ainsi le moine qu’elle a tant aimé et elle disparaît aussi dans les flammes.

Les serpents restent des animaux incompris. Il ne faut pas avoir peur des serpents car ce sont des animaux très généreux. Leur beauté et leur symbolisme se traduisent à merveille dans un tatouage japonais.


L'interdiction de tatouage au Japon

L’interdiction de tatouage au Japon

“TATTOO BAN IN JAPAN” – L’interdiction de tatouage en mots clairs

En date d’aujourd’hui, le Japon a toujours une interdiction de pratiquer l’art du tatouage. Après avoir discuté avec plusieurs tatoueurs japonais, je vais essayer de mettre en mots clairs ce phénomène qui semble si ridicule à nos yeux d’occidentaux.

Parce qu’ici ça ne passerait pas; les gens descendraient dans les rues pour protester! Mais au Japon, maintenant seuls les médecins peuvent tatouer! En résumé, cela qui signifie que pour pouvoir utiliser des aiguilles pour perforer la peau (i.e. : des aiguilles de tatouage), il faut avoir une licence médicale. Ceci peut sembler absurde mais c’est exactement ce qu’il se passe au Japon en ce moment. Les tatoueurs sont passibles d’amandes très salées et même d’emprisonnement.

Tout a commencé en 2001 quand le ministère de la Santé a classifié le tatouage comme une procédure médicale. Depuis ce jugement, le tatouage est resté dans une zone grise pendant plusieurs années. La loi prévoit jusqu’à 3 ans d’emprisonnement ou jusqu’à une amande de 1,000,000 yen (environ 12 000$ CAN) pour tout contrevenant.

En effet, en 2015 la cour de Osaka a condamné Taiki Masuda, un tatoueur de 30 ans, à une amande de 300,000 yen (environ 3600$ CAN) pour avoir violé « l’acte de pratique médical » qui réserve qu’au médecin le droit de pratiquer des « actes médicaux ». Depuis Masuda est en croisade contre cette loi injuste qui pénalise les travailleurs honnêtes. Il est le co-fondateur de l’organisme à but non-lucratif ‘’Save Tattooing in Japan’’.

Plusieurs événements ont amené le gouvernement à mettre en place cette loi. La première est à cause du maquillage permanant non-professionnel. Ils ont eu plusieurs problèmes avec des non-professionnels qui ont raté certaines procédures. Ainsi la solution du gouvernement est de seulement d’autoriser les professionnels de la santé à faire du maquillage permanent et d’utiliser ce type d’aiguille. Cela a donc eu pour conséquence de bannir aussi les aiguilles à tatouage.

La deuxième raison de cette loi est de rendre le tatouage inaccessible aux jeunes. En effet, contrairement à partout dans le monde où le tatouage gagne de plus en plus de popularité, le tatouage au Japon perd des adeptes et recommence à être discriminé. Le gouvernement essaye donc de limiter sa progression car au Japon, ça reste encore associé aux Yakuza… Ainsi, le tatouage est plus le symbole d’un échec social qu’un mouvement artistique.

Même si les tatoueurs se battent pour faire valoir leur travail comme de l’art. Le gouvernement reste sourd face à leurs revendications. Depuis la loi, plus de la moitié des studios ont fermés et beaucoup de tatoueurs quittent le Japon pour travailler.

Le tattoo ban ne touche pas seulement les aiguilles, plusieurs studios de tatouage ont dus enlever leurs pancartes extérieures écrites TATTOO. Louer un local pour faire du tatouage devient impossible à moins d’avoir des contacts. Même certains tatoueurs s’ouvrent une deuxième compagnie pour justifier leur revenu et ne pas se faire prendre par les Impôts. Bien sûr il est difficile pour les tatoueurs d’importer des aiguilles et du matériel de tatouage, certains sont même retourner à faire leurs aiguilles à la main.

Finalement, cette loi a eu pour effet de aussi de faciliter une certaine discrimination envers les gens qui ont des tatouages : Au Japon c’est très répandu de devoir suivre un examen médical pour travailler dans une grosse compagnie. Si le médecin voit un tatouage, il est possible que vous n’ailliez pas le poste ou même que vous perdiez votre poste.

Les enfants des gens tatoués peuvent se voir refuser l’accès à de bonnes écoles. Les conjointes de plusieurs de mes amis tatoueurs portent des pansements sur leurs tatouages de doigts à chaque fois qu’elle vont chercher leur enfants à l’école.

C’est ainsi qu’en février 2017, la convention de tatouage King of Tattoo 2017 a été annulée par les organisateurs. À cause de la pression du gouvernement, les organisateurs ont eu peur de représailles et ils ont aussi eu peur que tous les artistes cancel leur présence à l’événement. Ils ont quand même fini par faire la convention mais à un endroit plus discret en novembre 2017.

En date d’aujourd’hui, j’ai le plaisir d’annoncé que Taiki Masuda a été acquitté le 14 novembre 2018 après un long procès de 3 ans. Il n’a pas été reconnu coupable et il veut continuer à travailler avec le gouvernement et les tatoueurs pour réussir à trouver un terrain d’entente. Car le gouvernement n’a pas révisé la loi, les studios de tatouage continuent à fermer et la mentalité des gens face au tatouage reste conservatrice. Il y a encore beaucoup de travail à faire pour que le tatouage soit reconnu comme une forme d’art.

J’espère que ce phénomène se résorbera et que le Japon réalisera que le tatouage est un art, avant qu’il ne reste plus de tatoueurs Japonais! Il est certain que plusieurs articles et plusieurs journalistes s’intéresserons à ce phénomène lors des Jeux Olympiques de Tokyo en 2020. Que vont-ils faire des visiteurs et des participants tatoués aux Jeux Olympiques?

Pour plus d’information, je vous invite à visiter la page de Save Tattooing in Japan :
http://savetattooing.org